Dans son roman BELLE, Khái Hưng s’est servi de la
Beauté comme modèle esthétique mais le sujet véritablement traité est cette
Authenticité, essence même de la Beauté. Où est la Beauté quand on tue, le héros
qui tue n’est-il pas en réalité un meurtrier… la beauté ne réside-t-elle pas
seulement dans la beauté du geste.
Du point de vue linguistique BELLE est un
véritable pont littéraire vers le romantisme français du 19è prisé
par la jeunesse vietnamienne de l’époque. L’héroïne avec le thème de la
jalousie morbide est un personnage emprunté à Julia de Trécœur d’Octave
Feuillet et mentionné par Ngọc, l’ami fidèle.
Plus qu’un simple sentiment d’amour, Khái Hưng
fait mention du ‘moi primitif, le ‘moi romantique, mystère enfoui au travers
de la danse chamanique en cours dans le Vietnam du nord. Une pratique taoïste,
le voyage extatique dans le lointain. Cette incorporation extérieure permet au
personnage de s’extraire de l’enveloppe charnelle pour retrouver l’immanence
de la vie face à l’authenticité des êtres, thème récurrent de la philosophie
chinoise, asiatique sur la liberté incontrôlable et incontrôlée [tiêu
diêu du,xiaoyáo
yóu逍遥de
Zhuangzi.庄子].
La quête du Graal est logée dans la recherche de la Beauté en soi, une valeur
intrinsèque dont l’extériorisation comme la beauté physique ou corporelle est
toute relative à l’exemple des concubines Yang Guifei (Dương Qúy Phi) et Xi
Shi (Tây Thi), l’une à la limite de l’obésité et l’autre atteinte d’anorexie.
BELLE
parle de la femme soumise aux archaïques dictats confucéens. L’auteur prône la
liberté, l’individualisme au travers de la conscience de soi toute
occidentale.
Par ailleurs, l’auteur nous donne de
précieuses indications sur la naissance et l’essor des laques dits de
Coromandel[i]
dans le pays d’Annam. Il met en parallèle la spécificité asiatique avec la
peinture sur huile venue de l’occident. Nouveauté, échange et transformation
de l’alter ego, l’altérité Orient/Occident.